Article de Bernard Grua, traduit de l’anglais : « Pakistan: extremism as a consequence of retardation or as a modernity crisis? »
Ramla Akhtar, une « citoyenne du monde » ayant un mode de vie occidental et une éducation britannique

Une vidéo YouTube de 2010 montre la présentation de certains thèmes à la mode qui, si l’on fait abstraction de l’accent ourdou, auraient pu être déroulés au Royaume-Uni, aux États-Unis ou en Australie.
Il est utile de savoir qui est la femme faisant cet exposé et de connaître ce qu’elle est devenue presque dix ans après.
En 2010, Ramla Akhtar, une citadine du sud du Pakistan, de religion sunnite, de style de vie occidental, issue d’un milieu aisé et ayant bénéficié d’une éducation britannique, se disait « citoyenne du monde». Elle mettait en avant un profil de « planificatrice sociale (?) », de « communicante » et de « futuriste humanitaire (?) » ayant comme « domaine de spécialisation » le « secteur des arts et des médias », « l’entreprise sociale » et le «futur équitable ».
Rmala Aalam sur le chemin de la radicalisation
Depuis 2013, cette femme s’est renommée en Rmala Aalam et est entrée dans un processus de radicalisation. Sur sa page Facebook personnelle et sur son blog Facebook « Black Mountain, Dragon Soul – a Wounded Mystic Spins Her Yarn » (À peu près : « L’Âme du Dragon de la Montagne Noire – une mystique blessée déroule sa fable » | « Montagne Noire », traduction de « Karakoram »), son discours est devenu nationaliste prenant une orientation xénophobe tournée contre les étrangers européens et américains. Elle les qualifie de « suprémacistes blancs » et de « colonialistes ». En 2015, elle revendique par ailleurs la fondation d’une pseudo ONG, Ramla’s Projects, dont l’orientation serait le développement durable. En réalité, cette entité qui n’a pas de statut légal ne concerne qu’elle même et un groupe Facebook qu’elle administre. Il ne lui est connu aucune réalisation tangible à l’exception du design de quelques pages « Google Sites » diffamatoire usurpant l’identité de Pamir Serai, une guesthouse de montagne, dans le but de nuire à la famille qui en vit.
Obsédée, selon ses propres mots, par sa « peau brune », elle profère des discours de haine contre le peuple Wakhi, une minorité ethnique (de type persane) et religieuse (branche chiite ismaélienne) pacifique vivant dans les chaînes du Karakoram et du Pamir qui bordent le nord du pays. Une des principales victimes de ces faits délictueux est la famille de M. Alam Jan Dario, tenant les Pamir Serai guest houses dans la vallée de Chapursan (voir aussi: PamirSerai guest houses light version). Son appel du 16 septembre 2019, visant à s’armer contre ces communautés a créé une forte émotion régionale. Il a été transmis au ministère de l’Intérieur du Pakistan, aux médias locaux et à d’autres Autorités françaises ou pakistanaises.
Ce Tweet fait suite à une analyse détaillée alarmante du 13 juin 2019, qui a été envoyée à l’ambassade de France au Pakistan, à l’ambassade du Pakistan à Paris, au Ministère du tourisme pakistanais ainsi qu’au Ministère du tourisme du Gilgit-Baltistan (territoires du Nord Pakistan): « Rapport d’un voyageur français sur un discours local de haine contre la minorité Wakhie de la Vallée de Chapursan et contre ses visiteurs internationaux – évaluation de la crédibilité des invocations de complot sexuel contre les femmes de la région et les touristes étrangères – préoccupations concernant un extrémisme externe naissant « . (en anglais)

Quand le fondamentalisme se cache derrière le détournement de grandes causes contemporaines

Curieusement et ironiquement, Ramla Akhtar, alias Rmla Aalam, rapporte une rumeur affirmant quelle est une terroriste. C’est l’une des différentes théories du complot dont elle est familière.
Son approche est originale, non seulement parce qu’elle est une femme, mais aussi parce qu’elle instrumentalise le féminisme moderne, la lutte contre le patriarcat en Asie centrale, les préoccupations pour l’environnement, les considérations relatives au développement, la prédication « religieuse », la condition de la mère célibataire et la lutte contre la non-discrimination.
Ces causes détournées, bien qu’étant un mélange déroutant, sont l’écran de fumée idéal pour ouvrir la voie à la destruction du lien social, aux conflits inter-ethniques et au fanatisme, dans cette haute vallée de La Hunza. Elles empêchent tout questionnement rationnel.
Il est trop tôt pour avoir une vue d’ensemble du processus en cours et de son éventuelle extension. Le cas, cependant, nécessite une attention soutenue. Les pays européens devraient disposer des outils appropriés pour identifier ces profils instruits, mais radicalisés, lorsqu’ils postulent pour un visa d’entrée dans nos pays ou, qui sait, pour une demande d’asile.

Annexe 1: Wakhis de la haute vallée de la Hunza
Annexe 2: Autres articles de Bernard Grua sur la vallée de la Hunza et sur le Pamir:
- La Karakoram Highway, prototype du schéma colonial de la Nouvelle Route de la Soie dans un Etat en perte de légitimité ?
- Le Grand Jeu : rencontre anglo-russe aux confins du Pamir, de l’Hindou Kouch et du Karakoram
- Quelques Réflexions sur le développement d’un tourisme responsable et communautaire dans la vallée de la Hunza, Pakistan
- Chapursan, quand la nuit de Zoodkhun dévoile l’univers
- Report of a French traveler about a domestic hate speech against the Wakhi community
- What to see and what to do in a short period of time in Hunza?
- At the knot of past empires: Zood Khun, a Wakhi village in the high northern mountains of Pakistan
- Tusion, the hidden gem of Pamir










