Le 24 février prochain, osons parler haut, fort et clair.

Ukraine, le 24 février prochain, osons parler haut, fort et clair.

Visuel de couverture par Mariia Loniuk, @art.malon

Le 24 février 2024, marquera le jour du sinistre deuxième anniversaire du déclenchement de l’invasion à grande échelle de l’Ukraine par la fédération de russie, tournant paroxystique d’une guerre d’agression lancée il y a dix ans déjà. À cette occasion, les associations françaises soutenant réellement l’Ukraine ont décidé de lancer une journée de mobilisation nationale. Voici quelques idées sur ce que pourrait en être la communication. Sauf citations explicites, ces propos n’engagent que l’auteur de ces lignes.

Comment avoir une communication représentative de la diversité des organisations impliquées ?

Il est crucial d’avoir un discours unitaire tentant de reprendre les préoccupations de chacun. Mais il s’agit d’un exercice encombré d’obstacles, car il peut en résulter une compilation lourde, redondante, ne suivant pas un chemin logique et n’étant, en rien, une démonstration ou une incitation à l’action. Le lecteur risque de se perdre dans un foisonnent de répétitions de mots, d’idées, voire d’expressions. De plus, comme dans tout pudding constitué par les invendus d’un pâtissier, on y trouverait des éléments qui n’ont rien à y faire. Le vieil adage populaire, « qui trop embrasse mal étreint », pourrait s’avérer malheureusement pertinent.

L’art de la synthèse imposera donc des efforts rédactionnels et, probablement, des concessions mutuelles. C’est à ce prix qu’il sera possible d’envisager la publication éventuelle d’une tribune dans un média national ou régional.

A qui nous adressons-nous ?

La communication ne peut pas seulement viser des lecteurs instruits et honnêtes. Elle sera potentiellement exploitée par des ignorants ou par des individus de mauvaise foi, y compris chez les médias qui ont pignon sur rue. Tout le monde n’est pas le président Zelensky s’adressant à des Chefs d’Etat. Nous nous devons de parler haut, fort et clair pour être entendus par tous. C’est une tâche malaisée comme nous ne cessons de l’observer depuis un an et demi. En effet, dans un domaine voisin, No Standart For Europe tente sans relâche d’informer la presse régionale et de corriger les approximations, voire les fake-news, parus chez Ouest-France, Le Télégramme, Presse-Océan, la Manche Libre, Nord-Littoral, Sud-Ouest, France 3, France Bleu, La Voix du Nord, Actu Fr… Par ailleurs, il est possible de trouver, aussi, des contre-vérités, si ce n’est des faux témoignages, dans Le Monde, Libération, BFMTV et l’AFP.

Nous nous devons de parler haut, fort et clair pour être entendus par tous.

Mais revenons à la presse régionale. Ainsi qu’il peut être constaté, sur des dizaines d’exemples, ce sont des journalistes de faits divers qui écrivent sur les manifestations ou sur les événements concernant l’Ukraine. Dès lors, ces rédacteurs, dénués de toute connaissance concernant le sujet qu’ils traitent, appliquent une doxa consensuelle très simpliste, voire merveilleuse. Tout est mis en œuvre pour y coller. En clair : « il n’y a pas de problèmes entre les russes et les Ukrainiens, qui sont si proches par tant d’aspects. Tout ce qui se passe en Ukraine est de la faute, et de la seule faute, de poutine. Les russes, en France, soutiennent les Ukrainiens »… quand ces mêmes russes ne se déclarent pas faussement ukrainiens.

Dans un événement qui soutient l’Ukraine, le point de vue d’un seul russe a autant de place, pour de nombreux médias, que celui de trente ou cinquante Ukrainiens. Le « bon russe », même s’il est seul, accrédite la guimauve éditoriale. Notre production sera immanquablement détournée par des citations choisies et décontextualisées. Nous aurons fatalement des titres du style « Forte mobilisation pour la paix ». Des plumitifs, sans même lire le détail de notre énoncé, surenchériront probablement sur les titres de leurs confrères : « Forte mobilisation pour négocier avec poutine ». Par la concision, et en évitant les considérations accessoires, nous devrons veiller à limiter drastiquement les falsifications possibles. Car il ne faudra pas compter sur l’obtention d’un quelconque droit de réponse.

Boris Groh - Our lovely neighbor
Boris Groh – Our lovely neighbor

Faut-il s’exprimer sur poutine ou sur les russes et la russie ?

Nous devons avoir un message qui ne soit source d’aucune confusion. Dans les trois questions ci-dessous, notre déclaration ne doit répondre qu’à la première. Les autres sont hors sujet.

  1. S’agit-il d’une manifestation contre la guerre russe et pour la victoire de l’Ukraine ?
  2. S’agit-il d’une manifestation contre le régime russe ?
  3. S’agit-il d’une mobilisation pour soutenir les russes se déclarant anti-poutine (même si c’est faux ou même s’ils continuent à partager une vision « protectrice » de l’Ukraine, c’est-à-dire colonialiste) ?
It's not just about Putin. Its about Russia
Illustration by @zosia_illustrates

Au passage, en ce qui concerne les « opposants russes », on peut rappeler qu’ils ne sont pas exempts de lourdes ambiguïtés. Prenons l’exemple d’un Vladimir Martus ou d’un Lev Ponomarev d’abord attachés à promouvoir une image présentable de la russie. Pour le premier, on ne peut pas exclure qu’il agisse en accord avec les services spéciaux de Moscou, tout en se faisant passer pour un opposant auprès d’une presse française, qui se refuse systématiquement à partager nos éléments sourcés contredisant son narratif. Pour le second, tout auréolé de son récent prix Nobel de la paix, on se souvient de sa méprisante et condescendante admonestation de « grand frère russe », qu’il a adressé à Marianna Perebenesiuk sur le plateau de TV5.

Ce n’est pas poutine qui a fait la russie. C’est la russie qui a fait poutine. Lisons :« Why Russians are to Blame for Putin » par Iryna Podolyak, ancienne vice-ministre de la Culture de l’Ukraine.

Comme le dit Anna Colin Lebedev, « la culture russe est la mère de la guerre ». Il s’agit bien d’une guerre russe d’anéantissement menée sur le territoire de l’Ukraine contre la population, la nation, la culture et le patrimoine ukrainiens. Ne nous égarons pas. Aujourd’hui, l’ennemi du continent européen, dont l’Ukraine est le pays géographiquement le plus étendu, c’est la russie, et pas seulement poutine.

L’ennemi du continent européen, c’est la russie, pas seulement poutine.

L’agresseur russe.
Rvmember, it was n't me. It was Putin.
By Janek Koza @koza_janek
Stop justifying the Russians
База креативних постерів: Валентин Ткаченко
Aujourd’hui l’Ukraine, demain l’Union Européenne
L'Ukraine et l'europe

Quelle place pour l’opposition russe anti-poutine ?

Interrogeons-nous.

  • L’opposition russe est-elle capable de renverser poutine ?
  • L’opposition russe est-elle capable d’arrêter la guerre ?
  • L’opposition russe est-elle numériquement importante en France ?
  • Est-il pertinent de disperser nos forces en soutenant l’opposition russe ?
  • Notre mobilisation peut-elle avoir un impact quelconque sur la gouvernance russe ?

Ma réponse est cinq fois « non ». Nous avons eu 20 ans pour manifester contre poutine. Maintenant, il est trop tard. Et cela ne ferait que créer de la confusion. Après l’événement de Rouen contre le viol du 5e volet des sanctions, Olesya Telizenko avait fait paraître un papier dans un média ukrainien: « Nous avons manifesté contre les russes ». Elle ne s’embarrassait pas de circonlocutions. Elle avait raison. Comme le recommande Alexandra Goujon, écoutons les Ukrainiens.

Why are Ukrainians skeptical of « good Russians? » – Kyiv Independant

Ne louvoyons pas, à peine d’être inaudibles. Si nous sommes forcés de choisir entre les Ukrainiens et les « opposants » russes, alors il faut laisser tomber les seconds. La cause ukrainienne n’a pas à donner une visibilité artificielle à des officines marginales ou à se faire instrumentaliser par les convulsions d’un « Rousskii Mir » en proie à ses propres démons et à sa quête de blanchiment.

Comment parler de la paix ?

Colombe de la paix sur l'ambassade de russie à Paris
La plus grande colombe de la paix que l’on puisse trouver en France est située sur l’ambassade de russie à Paris (Photo par ALAIN JOCARD / AFP)

Tout le monde souhaite la paix, y compris les pro-russes et les pro-poutine. Ceux-ci veulent consolider les acquis de l’invasion afin de pouvoir, tranquillement, préparer l’agression suivante contre l’Ukraine et d’autres pays. Abuser, à des fins d’audience, du terme de « paix », présente le risque de cautionner toutes les « solutions » prônées, pour y parvenir, par la russie et ses idiots utiles : désarmement de l’Ukraine, capitulation de l’Ukraine, concessions territoriales, déportation, épuration ethnique, emprisonnements, torture, russification, adoptions forcées, etc.

À ce titre, il faut souligner la cuisante expérience nantaise résultant des agissements d’une « Coordination pour la Paix », fourre-tout d’une nuée de partis et de syndicats, dont l’animateur, un politicien en retraite, ex leader trotskiste à la CGT, se fait passer pour le chef local de la cause ukrainienne et prétend parler au nom des Ukrainiens. Dans le même temps, il œuvre, main dans la main, avec les réseaux russes ou pro-russes. « Au nom de la paix », il n’a pas hésité à recourir, au chantage, à la calomnie et à des pratiques lobbyistes contre la principale association franco-ukrainienne de Loire-Atlantique.

Il s’agit d’abord et seulement de réclamer des armes pour l’Ukraine afin de battre l’armée russe et d’assurer la victoire militaire ukrainienne.

À mon sens, notre mot d’ordre doit être simple. Il s’agit d’abord et seulement de réclamer des armes pour l’Ukraine afin de battre l’armée russe et d’assurer la victoire militaire ukrainienne. Puis, par la suite, uniquement s’il nous est demandé pourquoi, nous répondrons que c’est ainsi que la paix a pu être restaurée en 1918 et en 1945.

Chaque chose en son temps. Clémenceau, Churchill ou de Gaulle invoquaient la victoire, pas la paix. Aujourd’hui, en Europe, nous en sommes là.

Les hommes qui ont rendu possible la paix en Europe ne parlaient que de victoires militaires.
Sem (1863-1934). "Le Père la Victoire" (Georges Clemenceau (1841-1929).
Sem (1863-1934). « Le Père la Victoire » (Georges Clemenceau (1841-1929).
Lithographie. Paris, musée Carnavalet.
Charles de Gaulle : "Il faut que la France, ce jour-là, soit présente à la victoire. Alors, elle retrouvera sa liberté et sa grandeur."
Charles de Gaulle : « Il faut que la France, ce jour-là, soit présente à la victoire. Alors, elle retrouvera sa liberté et sa grandeur. »
Le signe V pour la Victoire de Winston Churchill est peut-être l'un des plus emblématiques de la Seconde Guerre mondiale.
Le signe V pour la Victoire de Winston Churchill est peut-être l’un des plus emblématiques de la Seconde Guerre mondiale.
Les hommes qui ont rendu possible la guerre en Europe ne parlaient que de paix.
1938, Paris : Daladier, et la paix sauvée
1938, Paris : Daladier, et la paix sauvée
1938, Chamberlain : "It is peace for our time"
1938, Chamberlain : « It is peace for our time »
30 octobre 1940, Pétain  : "C'est dans l'honneur et… dans le cadre... du nouvel ordre européen, que j'entre aujourd'hui dans la voie de la collaboration"
30 octobre 1940, Pétain : « C’est dans l’honneur et… dans le cadre… du nouvel ordre européen, que j’entre aujourd’hui dans la voie de la collaboration »

Comment tenir un discours audible et pertinent ?

Notre communication pourrait être construite autour de trois thèmes :

  1. un constat sur la catastrophe humaine que vit l’Ukraine et sur le risque d’extension des opérations militaires russes au reste du continent européen,
  2. un appel au réveil des consciences et à la mobilisation,
  3. une interpellation à destination des dirigeants français et européens.

Notre propos devra viser un seul objectif : obtenir la victoire de l’armée ukrainienne afin de repousser l’agresseur dans ses frontières reconnues internationalement.

Si notre mobilisation est un succès, alors notre adresse aux dirigeants aura plus de chances d’être entendue. 

Rejoignez la mobilisation nationale.

ensemble le 24 février, logo
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https://bit.ly/ensemble24fevrier

Publié par Bernard Grua

Graduated from Paris "Institut d'Etudes Politiques", financial auditor, photographer, founder and spokesperson of the worldwide movement which opposed to the delivery of Mistral invasion vessels to Putin's Russia, contributor to French and foreign media for culture, heritage and geopolitics.

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