« Escale à Calais », la fable du Shtandart exposée sur « Nord Littoral » ne résiste pas aux faits

La fiction entretenue par le navire russe Shtandart et ses complices, afin de "justifier" la fraude aux sanctions prises à la suite des massacres de Boutcha, trompe régulièrement des journalistes locaux pourtant préalablement avertis
La fiction entretenue par le navire russe « Shtandart » et ses complices, afin de « justifier » la fraude aux sanctions prises à la suite des massacres de Boutcha, trompe régulièrement des journalistes locaux pourtant préalablement avertis. Et que dire des propos d’une préfecture maritime à qui l’on prête une absolution qu’elle n’a pas prononcée ? Nous en avons un exemple sur le média « Nord Littoral » de Calais.

A l’attention de:
M. Thomas Dagbert, Journal « Nord Littoral »

Copies:
M. Jacques Billant, Préfet du Pas-de-Calais
M. Marcel Charpentier, Président de la FRCPM
M. Grégory Faucquez, Journal « Nord Littoral »
M. Raphaël Baldos, Journal « La Croix »

Cher Monsieur Dagbert,

Je vous remercie pour la longue conversation que nous avons eu avant la rédaction de votre article « Un collectif se lève contre la venue du navire russe Shtandart lors d’Escale à Calais » paru le 14 juin 2023. Mais, comme je vous le disais, la fraude du Shtandart et sa fable en perpétuelle création sont devenues fort complexes. Je me permets de vous apporter les précisions, voire les démentis, suivants.

« Le navire immatriculé en Russie… soulève, parfois, la polémique sur ses origines et sur le discours de son capitaine Vladimir Martus. »

Le terme de « polémique » a été lancé par le réseau d’influence français qui s’est mis au service du navire russe. Depuis, il fait florès.

« Cette polémique est complètement idiote et ridicule… »

Michel Balique, principal lobbyiste français œuvrant pour le Shtandart, sur « Paris-Normandie » le 8 janvier 2023

Du côté de notre collectif, nous ne voyons pas comment le rappel de la législation européenne pourrait être légitimement qualifié de polémique. De même, nous ne voyons pas en quoi éclairer l’opinion française par des textes russes qu’elle ignore, dont nombreux sont ceux de la main de Vladimir Martus, serait polémique. La polémique vient plus certainement du côté de ceux qui se moquent des sanctions prises à la suite des massacres de Boutcha et promeuvent une fiction visant à « justifier » cette fraude. Elle est bien du côté de ceux qui servent les intérêts russes du Shtandart.

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« Le Shtandart, réplique d’une frégate russe de 1703, souffre de ses origines depuis le début de la guerre en Ukraine et l’invasion russe menée par Vladimir Poutine. »

La maison de Vladimir Martus n’est pas bombardée ou en ruine. Les membres de sa famille ne sont pas mobilisés, violés, torturés et assassinés par la pègre armée de Wagner, par des Kadyrovistes ou par des « mobyks » de Sibérie orientale. Ses enfants ne sont pas enlevés, déportés, adoptés de force et dérussifiés dans un pays ennemi avant de revenir massacrer leurs compatriotes. Ils n’habitent pas Marioupol, Kharkiv, Boutcha, Gostomel, Borodyanka, Nova Kakhovka etc. Ils vivent tranquillement au domicile familial de Saint-Pétersbourg. Martus n’essuie pas les tirs d’artillerie ou de missiles russes. Il a un yacht privé de 34,5 m, il peut naviguer où il veut. S’il ne souhaite pas rentrer chez lui, il lui est toujours possible de découvrir de nouveaux rivages, ceux des pays qui n’appliquent pas de sanctions contre la Russie. Ce n’est pas ça qui manque.

Escale à Calais : Quand Vladimir Martus se prétend victime de Poutine
Quand Vladimir Martus se prétend victime de Poutine

Évitons donc l’inversion victimaire. Ceux qui souffrent de leur origine, ce sont les navires historiques ukrainiens « Anna Yaroslvana » (Odessa) et « Presvyata Pokrova » (Lviv) mis au sec à Brest et à Châteaulin, dont les équipages sont mobilisés. Deux équipiers de la tchaïka « Presvyata Pokrova » ont déjà été tués sur le front, mais, pour le Shtandart, tout va bien. Son origine russe, sa prétendue dissidence et son habile instrumentation du malheur ukrainien sont de solides arguments marketing jamais remis en cause. Il est reçu à bras ouvert dans les ports français grâce à un fallacieux sauf-conduit. S’il vous en fallait une preuve, elle serait chez vous. Ce ne sont pas les bateaux intéressants qui manqueront à « Escale à Calais ». Pourtant, Marcel Charpentier, président de la FRCPM, a prévu d’inaugurer l’événement à bord du navire russe Shtandart, comme il l’annonce dans votre journal.

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« Malgré un équipage international composé de Français, Russes et Ukrainiens notamment ».

Il est très fréquent que les moyens et grands voiliers aient des équipages internationaux. Pour le Shtandart, cela est d’autant plus vrai que jusqu’en mai 2022 les vaccins russes contre le COVID n’étaient pas reconnus par l’UE. Il a bien fallu trouver du monde en dehors de la Russie. On reviendra sur le cas d’Arthur Gazzarin, mais il est vrai qu’il y a un ou plusieurs marins-passagers français à bord du navire. C’est relativement logique. Notre pays est occupé par le Shtandart depuis plus d’un an. Il a même pris, « de facto, La Rochelle comme port d’attache depuis le 8 juin 2022.

Escale à Calais : Le Shtandart a fait de La Rochelle son port d'attache
Le Shtandart a fait de La Rochelle son port d’attache

En fait « d’UkrainienS », pour ce qui est des hommes mobilisés pour défendre leur pays contre l’invasion russe, ils ont quitté le bord dès le début de l’invasion à grande échelle de l’Ukraine par la Russie. La seule personne de nationalité ukrainienne que l’on trouve régulièrement à bord est Ulyana, une trentenaire dont Vladimir Martus a fait connaissance sur une plage de Nice en avril 2022. Pour être complet, il faut souligner le passage intermittent, depuis janvier 2022 (avant l’invasion), d’Ekaterina Gopenko, chanteuse de langue russe originaire de Zaporijia. Quand elle est présente, elle est mise en avant, avec Ulyana, afin d’accréditer l’affabulation d’un « navire de réfugiés » ou de « navire de la paix ». Mais comme je le rappelais dans mes courriers à votre journal, le cinquième volet des sanctions et l’article 3 sexies bis du règlement européen n°833/2014 portent sur TOUT navire immatriculé sous pavillon russe. La nationalité de l’équipage, du capitaine et de l’armateur n’entre pas en ligne de compte. Le point est donc hors sujet. Nous nous gardons bien de stipendier ces deux femmes hélas très utiles dans la fiction toxique de Martus. Nous n’en parlons que lorsqu’il est nécessaire de démystifier la fable de membres d’équipages ukrainiens auprès de journalistes, qui promeuvent cette fantaisie avant d’avoir mis les pieds à bord et sans avoir pu vérifier ce qu’il en était réellement.

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« Un collectif baptisé No Shtandart in Europe s’est révolté (à la Semaine du Golfe) contre la venue du navire russe. »

En fait de « révolte », il s’agissait de deux manifestations paisibles et familiales raillées comme insignifiantes, dans votre journal, par Marcel Charpentier. Elles comprenaient une majorité de femmes ukrainiennes et d’enfants. Elles étaient déclarées à la préfecture et ont fait l’objet de récépissés. Nous nous sommes coordonnés avec leur service de sécurité. Nous avons écarté toutes provocations, y compris celles tournées contre nos participants. Vous pouvez en obtenir confirmation auprès de Mme Marie-Odile Duplenne.

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« Et ils sont parfois chahutés. »

Dès le 21 mars 2022, avant même l’arrivée du Shtandart en France, Michel Balique a distribué un narratif ukrainophobe tenant à accréditer le fait que tout opposant au viol des sanctions était un dangereux extrémiste adepte de la violence. En cela, il rejoignait la propagande anti-ukrainienne popularisée par le Kremlin, dès 2014, lors de l’annexion de la Crimée et du déclenchement de la guerre dans le Donbass.

Escale à Calais : Michel Balique reprend les éléments de langage du Kremlin pour promouvoir le viol des sanctions
Michel Balique reprend les éléments de langage du Kremlin pour promouvoir le viol des sanctions

Depuis lors, Michel Balique n’en démord plus. C’est peut-être ce qui explique les menaçants propos de Marcel Charpentier, le président de la FRCPM, dans un des trois articles de Nord Littoral en date du 14 juin 2023. Il y a été répondu de façon détaillée ici: « Perturbations à Calais ?« , « Opération anti-terroriste » et encore là « Fauteurs de troubles« . C’est probablement cette atmosphère ukrainophobe, dans laquelle baigne le milieu pro-Shtandart, qui explique le faux témoignage d’Arthur Gazzarin dans « Libération », au mépris des récits de la presse et de la gendarmerie qui étaient présents. Une plainte pour diffamation a donc été déposée contre le matelot de Martus et contre « Libération » par Jean-Claude Orgeval, notre coordinateur Finistère-Morbihan.

Escale à Calais : Récépissé de dépôt de plainte contre Libération et contre le matelot de Vladimir Martus, qui y a produit un faux témoignage
Récépissé de dépôt de plainte contre Libération et contre le matelot de Vladimir Martus, qui y a produit un faux témoignage ukrainophobe

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« Le Shtandart qui est immatriculé en Russie, même s’il ne bat plus pavillon russe. »

Le Shtandart continue à arborer systématiquement le pavillon et la flamme de guerre russes. Il ne les affale qu’à la demande expresse des organisateurs de festivals ou des autorités locales, comme dans les ports de La Rochelle, de Douarnenez et de Rouen. De toute façon, peu importe les vrais ou faux drapeaux arborés. On rappelle à nouveau que les sanctions portent sur TOUT navire immatriculé sous pavillon russe.

Escale à Calais : Le Shtandart arbore pavillon et flamme de guerre russe
Le Shtandart arbore pavillon et flamme de guerre russes

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Le Shtandart russe vit de prestations commerciales, en France.

Escale à Calais : Prestation commerciale du Shtandart, navire russe embarquant 75 passagers en violation des sanctions européennes
Prestation commerciale du Shtandart, navire russe embarquant 75 passagers en violation des sanctions européennes

Mais, là aussi, peu importe. Le règlement européen ne fait aucune distinction de ce type. Seul un courrier non signé de la DNRED (Direction Nationale du Renseignement et des Enquêtes Douanières), en date du 23 janvier 2023, en fait état. Mais c’est un document fallacieux. Lire : « Le texte de la DNRED est incompatible avec le règlement européen ». Les sanctions concernent TOUT navire immatriculé sous pavillon russe.

Escale à Calais : JT de France 3, 18 Mars 2023
JT de France 3, 18 Mars 2023

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« Je n’encourage pas la guerre, je ne supporte pas Poutine !, lâchait-il à nos confrères de Ouest France au mois de mai. Mon pays est sous le joug du dictateur Poutine ».

Ne soyons pas naïfs et sachons observer. Toute officine russe, même non visée par les sanctions à la différence du Shtandart, désirant poursuivre ses activités en France, dit au minimum ne pas soutenir la guerre. L’inverse serait contraire à la prospérité de ses affaires. Vous me demandiez pourquoi le Shtandart peut frauder les sanctions en France à la différence des autres pays européens. Nous avons ici une des nombreuses explications. La presse régionale « traite » l’affaire internationale du Shtandart comme un événement local. Elle est d’ailleurs, la plupart du temps, partenaire des festivals maritimes qui ont recours aux prestations commerciales du navire russe. Avide de belles histoires festives, ne voulant pas déplaire à ses partenaires et aux autorités locales, elle se contente de tendre son micro à Vladimir Martus ou à son réseau. Elle ne procède à aucune vérification. Dans le meilleur des cas, elle utilise des guillemets. Mais dès que l’article est repris par le même journal ou par un confrère, les guillemets tombent. La baliverne est devenue une vérité établie. Certains journalistes ajoutent, parfois, une petite touche de merveilleux, issue de leur propre imagination pour ne pas passer pour de simples plagiaristes. C’est ainsi que s’est construite la bulle factice et romanesque du Shtandart. C’est ainsi qu’elle continue à grandir. Vladimir Martus se prétend maintenant (18/06/2023) l’équivalent de Charles de Gaulle dans une dépêche AFP reprise, sans discussion, par une dizaine de médias. Quant à la réglementation européenne et aux lanceurs d’alertes, ils sont ignorés, moqués ou la cible de procédures bâillons. Il n’est jamais donné suite aux droits de réponse documentés que nous envoyons. Les éléments circonstanciés, que je communique à votre journal, connaîtront probablement le même sort.

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« Je suis russe. »

Russe et non pas ukrainien, comme il le prétend parfois auprès de ses visiteurs. Sur les réseaux sociaux, des contradicteurs, ayant pris passage à bord, nous ont aussi affirmé qu’il était marié à une Ukrainienne…

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« Mon père, décédé en 1987, était ukrainien ! »

J’ai déjà largement expliqué comment Vladimir Martus nous montre qu’il n’a aucune fibre ukrainienne. Voir : « Un père ukrainien ?« .

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« Le capitaine du Shtandart a cependant toujours réfuté ces accusations. »

Ainsi, Martus réfute ce qu’il a écrit, en russe, concernant son litige avec son autorité de tutelle russe pour des questions de sécurité et non pas pour des motifs politiques. Il récuse le fait qu’il a lui-même annoncé, sur Instagram, sur Facebook, sur le site du Shtandart, sur Fontanka.ru, à la mi-juillet 2020, que le litige était terminé et qu’il pouvait rentrer à Saint-Pétersbourg. Il récuse les textes de la presse (en russe, en anglais et en grec) ainsi que les articles de la Société russe de géographie actant de son ambassade d’octobre 2021 pour le « dictateur Poutine » qu’il « ne supporte pas ». Il se moque de vous. Mais aucun média, en France, ne s’en étonne. Les faits dûment sourcés, y compris de sa main, ne seraient que des « accusations » que lui et la presse écartent. Ces éléments ont été détaillés auprès de votre journal : « Sournoisement au service de l’idéologie de Poutine ? » et « Vladimir, pro-Poutine ?« .

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« Les ports français qui l’accueillent, parfois depuis plusieurs années, comme à Calais ».

Depuis lors, il y a eu l’invasion à grande échelle de l’Ukraine et les massacres de Boutcha sous les couleurs russes. Il y a eu l’interdiction à TOUT navire russe d’être présent dans les ports européens à compter du 16 avril 2022.

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« Nous allons également transmettre un courrier à la préfecture du Pas-de-Calais et du Nord (le Shtandart doit également faire escale à Dunkerque, ndlr) pour obtenir des explications. »

Ce n’est pas exact. Nous ne demandons aucune explication aux préfectures auquelles nous écrivons. Nous leur demandons de veiller à l’application du règlement européen comme elles en ont la responsabilité, selon la Commission européenne. Nous leur rappelons que les complices de la fraude du Shtandart sont passibles de poursuites pénales depuis le 28 novembre 2022. Nous prenons aussi date pour l’avenir, afin que l’ignorance ou la bonne foi ne soient pas plaidables en justice.

Voir: « Navire russe Shtandart: M. le Préfet du Pas-de-Calais, interdisez la fraude aux sanctions européennes ».

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« Interrogée à l’été 2022 et début 2023 par nos confrères du Télégramme, la préfecture maritime avait confirmé que ce navire école et navire du patrimoine n’était pas concerné par les mesures européennes contre la Russie« .

Nous n’avons pas entendu parler d’une réponse de la part de la préfecture maritime de Cherbourg dont dépend Calais. D’ailleurs, à notre connaissance, Premar Cherbourg n’a jamais répondu à Joce Hue d’Actu76, qui lui avait posé la question, en janvier 2023. Nous n’avons lu, dans la presse et de la part de Gérard d’Aboville, que des interprétations plus ou moins fantaisistes de la trop subtile réponse émise par la préfecture maritime de Brest. D’après ce que nous savons, seul Raphaël Baldos, dans le journal La Croix, a cité textuellement les propos de Premar 2.

Escale à Calais : Seule citation complète et non-interprétée de la préfecture maritime de Brest
Seule citation complète et non-interprétée de la préfecture maritime de Brest

Comme je l’avais souligné lors de notre conversation téléphonique, pour la Premar, il n’était pas question de sanctions, mais seulement du fait que le Shtandart ne serait pas concerné par la convention SOLAS, relative aux navires de transports de passagers. Ce point, qui « l’autorise » à naviguer en ayant déconnecté son AIS depuis le 6 juin 2022, comme les navires de commerce russes contournant les sanctions, fait débat. Quoi qu’il en soit, le Shtandart relève bien de plusieurs des conventions pertinentes qui permettent de le classer en tant que navire (russe, qui plus est) tel que spécifié au paragraphe 3 alinéa « a » de l’article 3 sexies bis du règlement UE n°833/2014. Lire : « L’article 3 sexies bis du règlement européen n°833/2014 vise bien à l’exhaustivité« . Dans le cas présent, selon la Commission européenne, « Les autorités compétentes pour délivrer les autorisations prévues dans le cadre du règlement européen 833/2014 sont les préfets de département« . Il ne s’agit donc pas des préfets maritimes. Ceci peut expliquer pourquoi Premar Brest n’a pas explicitement pris position et pourquoi Premar Cherbourg se tait.

Je me tiens à votre disposition pour toute explication complémentaire. Je vous prie, Cher Monsieur Faucquez, de bien vouloir agréer mes salutations les plus cordiales.

Bernard Grua, +33 753 900 344
Porte-parole du collectif #NoShtandartInEurope, Lieutenant de Vaisseau (R), navigateur féru de patrimoine maritime, cofondateur et ex porte-parole du collectif « No Mistrals for Putin », contributeur à l’ouvrage de Laurent Chamontin « Ukraine et Russie pour comprendre », contributeur à « Russia Beyond », « Ukraine Crisis Media Center », « Ukrinform », etc.

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Article publié sur Nord Littoral

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Publié par Bernard Grua

Graduated from Paris "Institut d'Etudes Politiques", financial auditor, photographer, founder and spokesperson of the worldwide movement which opposed to the delivery of Mistral invasion vessels to Putin's Russia, contributor to French and foreign media for culture, heritage and geopolitics.

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